“La sobriété éditoriale rend la communication des marques audible.”

Date :

13/11/2024

Type :

Interview

Crédits

Faire moins, mieux, autrement. Vous avez forcément déjà entendu ce mantra de communicant responsable. Pour autant, la mise en place d’une réelle stratégie de sobriété éditoriale au sein des entreprises reste (très) rare. On en discute avec Ferréole Lespinasse, consultante et auteure du Guide de la sobriété éditoriale.

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Comment définir la sobriété éditoriale ?

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‍Ferréole Lespinasse : L’approche par la sobriété éditoriale propose une application opérationnelle de la communication responsable. Il s’agit d’interroger la décision même de communiquer. D’envisager de renoncer, de faire des choix et de supprimer. Pour cela, cette approche nécessite de déterminer ses essentiels. En fait, la sobriété éditoriale intervient à tous les niveaux de communication : stratégie et diffusion, avec une même question à se poser : mon action est-elle utile ?

Si la réponse est oui, la sobriété éditoriale intervient alors au niveau de la production. Elle invite à interroger le choix du format éditorial, la clarté de l’information (langage clair), le canal de diffusion et enfin à définir le cycle de vie du contenu.

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Pourquoi est-ce devenu un enjeu crucial aujourd’hui ?

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‍F.L : Pour illustrer la nécessité d’opter pour la sobriété éditoriale, j’aime à rappeler que le numérique est responsable de 4% des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial, soit autant que l’aviation civile (chiffres Green-It)… Mais au-delà de cet argument écologique, il faut aussi savoir que 96,5% des pages du web ont un trafic nul (étude Ahref 2023 https://ahrefs.com/blog/search-traffic-study/). Cela signifie que seulement 3,5% du web est consulté ! Et cela pose donc de nombreuses questions sur l’utilité des contenus produits, sur l'infobésité (que nous subissons tous), comme sur le sens du travail des communicants. La sobriété éditoriale redonne de la densité à la communication pour la rendre plus concrète.

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Comment évaluer l'efficacité d’une stratégie de sobriété éditoriale ?

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Le principe fondamental reste toujours de se baser sur les 3 U de l’éco-conception : utile, utilisable et utilisé. Pour l’utilisateur, mon contenu est-il utile, est-il adopté (utilisable), est-il visité (utilisé) ? Bien sûr, les indicateurs de mesure doivent être adaptés aux enjeux et objectifs fixés. Par exemple, le nombre de posts utiles et leur empreinte carbone peuvent être évalués.

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Comment expliquer que la sobriété éditoriale ne soit pas déjà la norme ?

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F.L : Plusieurs freins existent, notamment la peur du vide qui peut se résumer en une phrase : “Si je produis moins, je serai moins visible”. Ce qui est faux et qui traduit une mauvaise connaissance du sujet. Il y a aussi la crainte du “Si je produis moins, ma hiérarchie pensera que je travaille moins” qui là aussi traduit une méconnaissance de la culture du contenu. Un contenu utile - donc de qualité - prend toujours du temps à concevoir et surtout à mettre à jour. Et puis il y a la peur de ne pas faire comme les autres. “Si je suis le seul à faire moins, je perds du terrain”.

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Quelles réponses apporter ?

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F.L : Il faut lutter contre les idées reçues, continuer d’évangéliser. D’autant qu’il existe des exemples, comme le journal Le Monde, qui a démontré que la réduction du nombre d’articles est corrélée à l’augmentation du nombre de lecteurs. L’équation est simple et peut s’appliquer à toutes les entreprises : moins de contenu à produire x des contenus de qualité = plus de valeur. Est aussi bénéfique le "content pruning" : il s’agit d’élaguer les contenus web pour ne conserver que l'essentiel. Les effets positifs sont nombreux : le parcours utilisateur est simplifié, le poids des interfaces diminue, les coûts sont réduits… Enfin, ne plus être dans la communication de masse permet de soigner son image de marque.

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Peut-on vraiment appliquer la sobriété éditoriale aux réseaux sociaux ?

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F.L : La question fondamentale à se poser est plutôt : quel est l'intérêt de communiquer autant sur les réseaux sociaux ? Par exemple, une carte de vœux postée par une entreprise sur LinkedIn a-t-elle vraiment du sens ? Est-ce que ce contenu est vraiment utile aux cibles ? Là encore, la peur de ne pas faire comme les autres est présente. Sur les réseaux sociaux la visibilité ne passe pas uniquement par une production organique soutenue. Et puis, la communication ce n’est pas que la communication digitale. Quand on veut informer, sensibiliser ses cibles, le print, ou l’audio permettent une rétention de l’information bien supérieure au digital.

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Le langage clair ? C’est une norme ISO 24495 stipulant que chacun a droit à des informations adaptées. Le langage clair doit permettre au lecteur de trouver, de comprendre et d’utiliser l’information. Concrètement, on travaille donc sur le style, l’édito et la présentation visuelle du contenu.

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